Le studio à partir du quel il observe la condition humaine pour la traduire en suite dans des modèles plastiques et dans des cartes tracées à l'échelle, qu'il soumet à notre méditation éventuelle, se situe et se cache dans une montgolfière. C'est assurément à partir d'un astronef "situe là-haut" ou d'un ballon qui vole à vitesse réduite que l'affrontement aveugle entre les hommes est réduit à une termitière hagarde, risible angoissante et déchirée.

Manifestement, c'est à partir d'une frontière sublime, détachée et aérienne que l'orgueilleux théâtre planétaire dévoile sa toile de fond calcinée, sa réalité vaine et cruelle d'un minéral aveugle et monochrome parcouru par des formes monochromes et insensées: des grappes délirantes d'insectes, des solitudes foudroyantes, des fourmillements aberrants. De là-haut, la mêlée est sans voix, sans son: un silence sidéral enveloppe les gestes excessifs et répétés des minuscules acteurs, leurs antennes, leurs élytres fébrilement occupées à construire des misérables erreurs et à parcourir des mesquins labyrinthes de vanité. Haut perché sur son observatoire, pointilleux à l'image d'un scribe, Soravia traduit en des hiéroglyphes plastiques les points saillants du spectacle absurde que les infimes protagonistes appellent histoire, progrès, civilisation ou chemin de rédemption.

Domenico Porzio



Les protagonistes du grand théâtre de Soravia, ce sont en fait les humbles, les pauvres, les menacés, les sans défense, mais c'est surtout la foule, considérée dans les manifestations d'ensemble de son existence comme dans le cercle d'un rempart naturel. Ces images aident à comprendre la veine poétique de l'artiste. Regarder d'en haut les vicissitudes humaines, c'est déjà pour Soravia une façon d'indiquer qu'il entend, au moins idéalement, serrer toutes les créatures dans une unique et affectueuse étreinte. Les voir lorsqu'elles forment une foule, lorsqu'elles sont liées, dans la même action, par le fils de l'existence, ceci signifie que rester ensemble, et se tenir par la main et participer aux mêmes rites constituent des façons instinctives de garantir la survie.

Luigi Carluccio



C'est vrai, les choses simples sont toujours difficiles à expliquer, disait Matisse, et c'est pourquoi il n'est vraiment pas facile de se limiter pour l'art de Soravia à un discours spécifique sur la sculpture, celui-ci débouchant ensuite sur une espèce de néoplatonisme mis à jour et emblématique qui tend à l'expressivité artistique en fixant avec des finalités esthétiques celles de la morale. Au sens de l'observation stupéfaite du sublime et peut-être, religieusement, de l'intangible.

Germano Beringheli



Sandro Soravia confie à ses mini personnages l'interprétation de l'idée initiale: celle par laquelle l'univers qui nous attend n'exclura en aucune façon l'esprit qui est en chacun d'entre nous et qui nous fait devenir "masse" uniquement dans le respect de notre individualité: et avec laquelle n'importe quel mythe et n'importe quelle découverte scientifique collective devront régler les comptes.

Gian Franco Vené



Soravia ne "raconte" pas, même si sa méthode peut sembler narrative au premier abord.
Le nombre toujours important de ses personnages est conçu, en fait, non pas comme une narration mais comme une synthèse du jugement, de l’idée centrale qui dicte la structure constitutive, qui en scelle nettement la signification. Au de là des personnages serrés et alignés il recourt à un petit nombre d’éléments: une plate-forme circulaire ou carrée, un cône, une sphère, un cube, un rond. Sur ces ou avec ces éléments essentiels, maintenus dans leur géométrie dépouillée, il distribue les personnages en suggérant les places, les stades, les prisons ou simplement les symboles intrinsèques au jugement.

Mario de Micheli



Pour armer sa réflexion existentielle, à partir d’images réinventées au fil d’une mémoire r’chauffée par l’actualité, Soravia, de ses doigts fervents,façonne dans la terre une foule de silhouettes minuscules et monochromes, archétypes d’un monde standardisé, comme vu au microscope, qui focalise l’entendement.
Devant les elans et les espérances étranglées de cette humanité réduite à l’infiniment petit, dépersonalisée, car sans signe distinctif, il nous incite à l’humilité. Il traduit ainsi son époque à travers un regard d’entomologiste, mais avant tout en plasticien conscient des devoir qui gouvernent sa sculpture. Ceci, dans l’affinement harmonieux des volumes, l’équilibre des contrepointset la rigueur des assemblages.
D’une éloquence austère, un tel itinéraire échappe aux conventions du réalisme e ne vise pas à la démonstration. Clair, lucide, insinuant, il n’est jamais désespéré, parce que teinté daffectivité. Par ailleurs, la gravité des évocations ménage la part d’espérance dont tout être est porteur, et ne repudie jamais les appels de l’humour.
Les terres cuites de Sandro Soravia, comme l’ensemble des volets de son oeuvre,nous invitent à la contemplation active, en nous parlant de l’infinie solitude de l’homme.

Gérard Xuriguera